Ce n'est pas pour flatter l'Ecole des Beaux Arts de Caen, mais au gré de ses différentes promotions, nombre d'artistes ont su tirer avec talent leur épingle du jeu créatif et s'imposer avec panache.

     Ainsi se présente le peintre Gaston HELIE, dont les participations récentes à de très bons salons régionaux, sans compter, excusez du peu, les salons des artistes français et de la Nationale des Beaux Arts à Paris, qui ont conforté sa renommée, jalonnée désormais de prix et de distributions dont il ne saurait rougir.

     Au fil de couleurs pastellisées, tour à tour veloutées ou fruitées, Gaston HELIE se remarque par la souplesse de son trait où règnent de voluptueux arrondis, qui n'en rendent que plus efficaces encore ses motifs captés avec une rigoureuse générosité et une ampleur descriptive pleine de charme et de compositions audacieuses.

     C'est à la fois hardi et délicieux, ce qui ne saurait être incompatible lorsque l'artiste s'attache à transmettre ses marchés animés d'une foule vitale et captivante, tandis que nombre de ses oeuvres composent un réjouissant tumulte de couleurs d'où surgit une exemplaire expression de plaisir.

André RUELLAN, critique d'art





     Aristote affirmait : « Le but de l'Art est de figurer le sens des choses et non leur représentation ».

     Mélomane sinon musicien, G. HELIE donne à entendre autant qu'à voir.

     Se méfiant du bruit excessif des couleurs fortes, avec humilité, le peintre à travers l'oeuvre poursuit un cheminement qui, s'il tend vers l'essence des choses, le mène probablement aussi (et autant) vers son propre « moi ».

     Construite sur la mémoire, la toile, à travers courbes et droites, spirales et contre courbes, lumières et ombres, trouve sa structure, son rythme. S'installe alors la mélodie, part du rêve qui donne à chacun de quoi nourrir sa propre vision. L'art devient, suivant la formule de Bazaine : « Un tempérament vu à travers la nature

     L'homme n'exprime jamais que soi, à travers soi ».

Association Socio-Culturelle et Sportive
Servaville-Salmonville




Le dialogue ininterrompu

     La peinture de Gaston HELIE est faite de réminiscences, d'impressions souvent héritées de sa jeunesse déjà lointaine. En partant d'un souvenir, il recompose un paysage qui n'existe vraiment qu'en lui mais où chacun peut venir puiser la substance de son propre rêve. L'hommage qu'il rend au cubisme et l'étendue de sa culture donnent à sa démarche une portée toute particulière. Nourrie de son imaginaire, chaque toile est comme une confidence, une mélodie secrète du coeur. Hélie n'aime guère les couleurs heurtées mais il accorde à la lumière et à l'ordonnancement des lignes un rôle privilégié, s'efforçant de mettre en pratique la formule de Bazaine : « L'art est un tempérament vu à travers la nature : l'homme n'exprime jamais que soi à travers soi. »

     Gaston Hélie ne cesse de dialoguer avec sa toile. S'il ne peut se prévaloir d'une production abondante, sa réflexion sur l'art est d'une incroyable saveur. Elle pourrait faire l'objet d'un livre fort intéressant. L'écrira-t-il un jour ? La réponse lui appartient. Ce qui est sûr, c'est qu'il ne cesse de revisiter ses souvenirs et d'en extraire le matériau d'une étrange aventure picturale. Ayant passablement voyagé au cours de sa carrière, qu'il consacra à l'univers bancaire où il devint expert en valeurs mobilières, animant de nombreux séminaires axés sur l'organisation des places financières internationales. G. Hélie fut contraint de s'absenter de la peinture. C'est ainsi qu'il mit 18 ans à retourner au chevalet. « Je ne me suis plus retrouvé comme je m'étais quitté. Un jour, alors que je séjournais à Nantes, je suis tombé sur une galerie où une toile capta mon attention pendant une vingtaine de minutes. C 'était une peinture rouge, d'une poétique extraordinaire. Je revins le lendemain. L'oeuvre portait la signature de Joël Dabin. Quelque temps après, il est venu à la maison. Ce devait être aux environs de 1990. Examinant l'un de mes tableaux, il déclara : « Vous avez là une toile d'une grande présence ». J'ai compris tout à coup ce que je recherchais c'était une sorte de musicalité dans la peinture. »

     Intarissable, Gaston Hélie poursuit : « Dans le livre qu'Henri Meschonnic publia aux Editions Odile Jacob, « Le rythme et la lumière avec Pierre Soulages », j'ai retrouvé cette harmonie que je poursuivais inconsciemment. Je suis moins musicien que mélomane, mais j'essaie de comprendre comment la musique est construite. Il en va de même pour la peinture qui obéit à certaines lois. La verticalité, par exemple, c’est la stabilité. La répétition des verticales est caractéristique de la musique de Bach. J'ai mis bien du temps à comprendre la signification d'une ligne. Seules la courbe, la spirale et la contrecourbe suggèrent l'idée de mouvement. De même, il faut savoir qu'on lit une toile de gauche à droite, à la manière d'un texte. C'est là un phénomène lié à notre culture. »

     Fasciné par la sonate et le quatuor à cordes, formes qui correspondent idéalement à sa vision de l'art, Hélie aime par-dessus tout la peinture du XXème siècle, qu'il préfère de très loin à celle des siècles précédents. « Ma forme de pensée fait que je suis plus sensible aux arts roman et gothique qu 'à la peinture de la Renaissance. » Et le peintre de rappeler la fameuse formule d'Aristote : « Le but de l'art est de figurer le sens des choses et non leur représentation ». Commentant les thèmes de ses toiles, Gaston Hélie se plaît à évoquer l'Allemagne, la vallée du Neckar, ses vacances en Alsace, son enfance pourtant liée au temps de l'Occupation (le souvenir d'un étang le hanta dans les deux années qui suivirent sa découverte de Dabin) et quelques sensations éparses, autant de visions fugitives mais emblématiques, comme ce bouquet d'arbres aperçu au bord d'une route alors qu'il conduisait, accompagné de sa famille. Dans « Confidence », Hélie a figuré deux saules (à moins qu'il ne s'agisse de peupliers) qui ont l'air de se raconter des histoires. Il aime la forme des têtards. Mais il raffole aussi des oliviers, dont les souches sont capables de résister à plusieurs siècles. Tendant vers un certain dépouillement et s’éloignant visiblement des couleurs vives de ses débuts, telles qu'elles apparaissent dans « La carrière aux pins », une toile de 1960 qu'il juge par trop chaotique, Hélie a déserté le couteau au profit du pinceau. Datée de 1985, « La forêt de Barbizon » arbore déjà une palette claire. Essayant de comprendre « ce que les choses nous ont légué », le peintre nous parle volontiers de ses promenades au bord du Rhin, des forteresses « mystérieuses et brutales » juchées sur les rives du fleuve, du « Chemin à travers le vignoble », des grandes plaines minérales d'Espagne, d'une certaine « fin d'été en Bourgogne » et du pays imaginaire... « Une toile est le chemin qui vous mène vers la suivante. Si je me suis mis à peindre, c 'était pour mieux partir à la découverte de moi-même, en laissant les toiles m'appeler. Elles finissent par se faire malgré vous et vous construisent, car au début. on ignore totalement qui l'on est. Avant de se mettre au travail, il faut savoir pourquoi on désire peindre. Et puis, un jour, on tombe sur une pensée dans laquelle on se retrouve tout entier. Cela vous donne un peu d'humilité. »

     Hélie ne craint jamais d'affirmer ses admirations pour Matisse, Cézanne, Bissière et Rothko, sans oser en quoi que ce soit, se comparer à de tels maîtres. L'important ne réside pas dans le fait d'atteindre un sommet, mais de savoir s'élever tout seul.

Luis PORQUET

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